Ca pique les yeux tellement c’est beau !
Le réveil le lendemain de ma chute est douloureux : mon épaule me fait bien souffrir et je dois absolument éviter tout mouvement brusque, voire tout mouvement tout court ! Nous quittons Semonkong et prenons la route qui retourne vers Maseru, la capitale du Lesotho. Encore une fois, nous sommes émerveillés par les paysages : les pâturages verts, les ânes et les chevaux sur la route, les petits villages… On ne s’en lasse pas ! Les paysages sont magnifiques mais les routes sont parfois très escarpées ! Et nous nous faisons une petite frayeur, au milieu d’une longue descente bien raide… une très forte odeur de brulé ! Alors qu’il utilise normalement énormément le frein moteur en 2ème voire en 1ère, là renaud était en 3ème et utilisait trop la pédale de frein. Heureusement nous pouvons nous arrêter au bord de la route pour évaluer les dégâts. Ça fume tellement que j’ai l’impression que ça va s’enflammer, je suis prête à sauter sur l’extincteur ! C’est surtout le frein arrière gauche qui fume, celui dont on vient de changer l’étrier – j’imagine que comme le système est neuf il appuie peut-être davantage sur le disque que l’autre côté ? Nous attendons une petite heure que tout ça refroidisse, avant de poursuivre la descente encore plus doucement qu’auparavant. Nous faisons une pause déjeuner à Roma, petite ville dynamique où se trouve la plus grande université du pays. Comme nous sommes heureux de retrouver les stands de rue, les poulets grillés, les petites baraques à frites, les odeurs de friture quand on marche dans la rue et les vendeurs de fruits qui se pressent à nos fenêtres !
Nous faisons l’impasse sur Maseru, et poursuivons l’après-midi notre route. Objectif : le barrage de Mohale. En chemin nous hésitons à aller voir les peintures rupestres de Ha Baroana. Nous demandons notre chemin dans un petit village et tombons sur 2 jeunes adorables qui s’échinent à nous expliquer, d’abord oralement puis sur le téléphone de Renaud… ils sont presque dans la voiture tellement ils sont impliqués. 5 fois, 10 fois, 20 fois ils nous répètent « prenez à gauche puis vous demandez votre chemin », ils ont vraiment à cœur qu’on trouve ! Bon ok il sont un peu alcoolisés, en pleine après-midi mais ça faisait longtemps que je n'avais pas autant ri avec des locaux. Malheureusement, nous nous rendons compte que la piste qui tourne à gauche n’est pas géniale et on n’a pas envie de prendre des risques pour des peintures rupestres. Nouvelle crise de rire quand on s’arrête à nouveau devant les 2 jeunes, qui sont tellement déçus qu’on n’aille pas là-bas malgré tous leurs efforts ! Et rebelote, ils nous tiennent en haleine une dizaine de minutes, dans un anglais très approximatif et un état d’excitation maximum, pour nous expliquer qu’on DOIT aller au barrage de Mohale (ça tombe bien c’est ce qu’on a prévu !). Bon là en texte ça ne donne rien, mais je peux vous assurer que nous on a pris un shoot de bonne humeur avec ces 2 gars montés sur piles 😉
Nous arrivons en fin d’après-midi vers le barrage, et commençons à nous inquiéter de ne pas trouver de bivouac ce soir : il y a peu de pistes qui partent de la route principale et elles sont toutes très escarpées. Au commet d’une colline surplombant le lac, nous découvrons avec surprise un immense complexe hôtelier avec des dizaines de bâtiments, un centre de convention et même un centre commercial. On pourrait probablement dormir ici, mais on se garde l’option en dernier recours car on espère trouver mieux. On continue, on continue jusqu’à arriver juste avant la gate du barrage et là surprise : un accotement aménagé en point de vue sur le barrage avec un petit parking, une poubelle et même une petite table en pierre. Le voilà notre bivouac ! Bon, étant donné que nous sommes visibles depuis la guerite qui marque l’entrée du barrage quelques centaines de mètres plus loin, nous nous donnons 50% de chance de pouvoir rester… on tente et on verra bien ! Mais en tout cas quelle vue ! D’un côté la rivière qui fait un méandre juste sous nos yeux façon « fer à cheval », de l’autre un bras du lac du barrage qui s’enfonce dans les terres. Ah et puis les couleurs !! je prends des dizaines et des dizaines de photos, me disant à chaque fois « ah la lumière a encore changé, c’est encore plus beau ! » Heureusement que le paysage est beau d’ailleurs car l’ambiance familiale est super tendue ces derniers jours : on se chipotte pour un rien, les enfants n’arrêtent pas de se battre/de s’accuser/de se chercher, l’école vire à la catastrophe tous les matins… Bref, pas évident de vivre dans un espace clos dans ces conditions, et j’apprécie particulièrement ce moment à prendre des photos de ce magnifique panorama apaisant.
Nous avons bien fait de rester ici, personne n’est venu nous déranger et la première voiture à passer sur la route le matin nous a simplement salué. Je continue d’ailleurs ma séance photos car la lumière du matin est encore différente de celle de l’après-midi 😉 Après le barrage de Mohale, nous aurions aimé prendre une piste conduisant jusqu’au barrage principale du pays, le barrage de Katse. Nous avons eu du mal à avoir des infos : des gens nous ont dit que c’était ok, d’autres non ; notre guide indique que la route est « praticable en conditions normales en véhicule de tourisme mais qu’il vaut mieux se renseigner localement ». C’est finalement via un groupe de voyageurs en Afrique sur facebook que je trouve l’info la plus pertinente : la portion de piste (environ 70km) qu’il faudrait prendre est à peu près carrossable en saison sèche, mais à cause des grosses pluies de ces dernières semaines 2 ponts ont été emportés et notre véhicule ne pourra pas franchir les rivières. Bon ben voilà qui est clair, demi-tour ! Nous partons après l’école (encore une cata au passage…) et nous arrêtons assez tôt pour déjeuner le temps qu’un orage passe. Juste avant la pluie, un homme s’approche de nous avec une batterie/chargeur dans la main. Il ne parle pas anglais mais on comprend qu’il voudrait qu’on lui charge, ce que l’on accepte évidemment. Cela arrive souvent, que des gens nous laissent leur téléphone pour quelques minutes (quand on remplit de l’eau au puit), quelques heures (quand on s’arrête pour déjeuner), voire toute une nuit ! Nous roulons un peu l’après-midi puis il est déjà temps de chercher un spot pour la nuit : nous nous enfonçons dans des champs de mais et de tournesols jusqu’à ne plus être visibles de la route principale. Parfait !
Le lendemain matin, le soleil est radieux. C’est dingue comme le temps est instable dans ce pays ! peut-être est-ce dû à l’altitude ? (le point le plus bas du pays est à 1400m !) ou bien aux montagnes qui l’entourent ? ) Ça tombe bien car aujourd’hui nous faisons une balade à pied jusqu’aux Kome Caves, des maisons troglodytes traditionnelles. Normalement on peut y aller en véhicule, mais la piste sur les derniers kilomètres ne nous inspire pas donc on abandonne pépère le long du chemin et on se met en route à pied. Des villageois nous indiquent un sentier qui nous évite de marcher sur la piste et nous savourons vraiment cette promenade. Bon mon épaule est toujours douloureuse et je vais très doucement quand ça descend raide, mais ça passe. Arrivés en bas, un joli bâtiment nous accueille, mais il est vide. Tiens, il présente quelques souvenirs, j’en profite pour photographier le chapeau traditionnel porté par les hommes ici, je n’ai pas eu l’occasion de le photographier de près. Au bout de quelques minutes, quelqu’un finit par arriver, nous nous mettons d’accord sur un prix et Ginette nous accompagne jusqu’aux maisons. Construites en terre et bouse de vache dans un renfoncement sous la roche, elles seraient encore habitées aujourd’hui par 5 familles. Je mets au conditionnel car franchement on a des doutes. Ça ressemble plus à un village expo qu’à de vraies maisons habitées. J’aurais préféré que ce soit annoncé comme ça, un peu comme les « living museum » en Namibie où l’on peut découvrir les cultures et traditions des différentes ethnies, mais sans nous faire croire que les gens y habitent vraiment 7j/7. Ajoutez à cela le fait qu’on doit presque quémander des explications à la « guide » qui nous répond par monosyllabes… bref ce ne sera pas la visite du siècle pour son côté culturel ni historique, mais on a vraiment aimé la promenade pour y aller donc ça compense ! Je suis sûre que les enfants retiendront d’ailleurs davantage les dizaines de jolies pierres qu’ils ont ramassées et qu’ils doivent maintenant trier pour ne garder que les plus jolies !
Nous reprenons la route après cette pause et nous engageons sur des pentes très escarpées conduisant au col de Mafika Lisiu (3090m). On envisage de dormir au col ce soir, on espère qu’il y aura un petit parking ou un renfoncement pour admirer la vue, comme souvent au sommet des cols. Au fur et à mesure qu’on grimpe, les panneaux « snow and ice » font leur apparition, de même que de nombreuses recommandations de ne pas doubler les camions. Arrivés en haut, bingo il y a bien un point de vue avec un parking ! La vue est un peu couverte par des nuages bas, mais on espère bien que ça se dégage demain matin !
Mercredi 9 mars, 7h00. J’ouvre les yeux et entrouvre mon rideau et waouh quelle vue ! Non mais des réveils comme ça, c’est quand même dingue, non ? Et dans le genre dinguerie, le reste de la journée ne sera pas mal non plus… la route conduisant au barrage de Katse est tout simplement sublime. Je suis désolée vous allez dire que je me répète et que je commence à utiliser un peu trop de superlatifs mais je ne sais pas comment vous décrire ce qui nous entoure : le lac avec ses différents « bras » qui s’enfoncent dans les terres, les nuages qui jouent avec leur reflet dans l’eau immobile du réservoir, les petites vallées parsemées de rondavelles… bon j’arrête là et je vous mets quelques photos !
Ah et puis il ne faudrait pas oublier le barrage en lui-même ! Une beauté à lui tout seul, d’autant plus qu’il déborde en ce moment, ce qui n’était plus arrivé depuis 2010. Nous voulions visiter le barrage, mais en arrivant nous découvrons que les visites guidées sont possibles uniquement à 9h et 13h, or il est déjà 15h. Aucun mais alors aucun problème pour attendre dans cet environnement, nous trouvons un magnifique endroit isolé pour dormir, près d’un stade de foot sur lequel les enfants jouent au foot/frisbee (et oui il faut bien se réinventer puisqu’ils ont perdu leur ballon il y a quelques jours…).
Le lendemain matin, nous sommes à l’heure pour la visiter guidée, mais devons attendre 45minutes que le guide arrive. Ça nous laisse tout le temps pour lire les panneaux d’information sur le projet hydro-électrique du pays, engagé à la fin de années 80 et qui a déjà pris beaucoup de retard mais qui vise à donner au Lesotho son indépendance énergétique grâce à l’une de ses plus précieuses ressources : l’eau, très abondante ici. Plusieurs barrages ont été construits (dont Mohale et Katse), d’autres sont prévus ainsi que d’énormes tunnels pour acheminer l’eau vers l’Afrique du sud, qui en manque cruellement. La visite du barrage est impressionnante et les explications du guide passionnantes. Les enfants posent plein de questions et « alertent » plusieurs fois le guide sur des fuites ou de petites fissures. On apprend que le niveau du réservoir est normalement une cinquantaine de mètres plus bas. Rempli à 100% le niveau atteint 2053m, aujourd’hui il est rempli à 2053,221m soit 22cm de trop donc il déborde ! Nous recommandons chaudement cette visite qui nous a vraiment intéressés, et pour 6€ pour nous 5, il n’y a pas de quoi se priver 😉
Nous profitons de la visite pour poser au guide des questions sur la suite de notre parcours et ce que nous redoutions se confirme : la piste qui continue après le barrage et qui pourrait nous permettre de rejoindre la route goudronnée la plus au nord du pays n’est pas praticable pour nous, les grosses pluies de ces dernières semaines ont endommagé les voies d’accès. Bon après la visite du barrage on a bien compris qu’on était sur une année exceptionnelle en terme de précipitations ! Soit, on fait à nouveau demi-tour. Je vous avoue que ce n’est pas tellement une contrainte finalement vu comme on a adoré le paysage à l’aller 😉 Tiens je vous partage un petit moment d’inconfort : on retrouve pas mal de mendicité ici au Lesotho. Absolument rien d’agressif ni trop pesant et lorsqu’on refuse poliment ils n’insistent pas, mais la main tendue est beaucoup plus présente que dans les autres pays d’Afrique Australe je trouve. Et ce midi, alors que nous nous arrêtons pour déjeuner avec une jolie vue sur le lac, une poignée de gamins se précipite en nous demandant de l’argent, de la nourriture, des « sweetee ». Sauf que là ils ne partent pas et ils sont bien insistants. Une adulte essaie bien de les faire partir mais ils reviennent au bout de quelques minutes. Alors on fait quoi dans cette situation ? Ben figurez-vous qu’on n’a pas de réponse toute faite : ça dépend de notre humeur et de l’attitude des enfants qu’on a en face. Une seule certitude : on ne donne jamais d’argent ni de bonbons à des enfants. Parfois on donne des fruits ou du pain, parfois rien, parfois on s’énerve en leur demandant de nous laisser tranquille (solution qui ne marche jamais), parfois on fait diversion en les faisant jouer ou dessiner (mais là nos enfants n’étaient pas dans le mood, il faut aussi savoir les écouter et ne pas les forcer). Alors ce midi on leur a donné la fin d’un paquet de main de mie et on s’est un peu énervés aussi car ils continuaient à insister. Un peu dépités on allait abréger notre café pour quitter les lieux lorsqu’un camion s’est garé près de nous et que le conducteur les a fait déguerpir. Je ne sais pas ce qu’il leur a dit mais ça a été radical ! Merci monsieur !
Nous poursuivons notre route et rejoignons enfin la route qui longe la frontière au nord du pays. Notre prochaine étape est un peu particulière, il s’agit d’une station de ski ! Bon là nous sommes en été donc on ne sait pas ce que ça va donner, mais ça nous intrigue bien. La station est trop loin pour la rejoindre dans la journée, nous trouvons un autre joli bivouac grâce à l’appli iOverlander que nous utilisons parfois. Nous sommes près d’une station de pompage, et le gardien est ravi de discuter un moment avec nous.
Le lendemain, nous arrivons à Afriski en fin de matinée, juste à temps pour profiter du restaurant d’altitude ! Bon petite déception j’espérais secrètement trouver à la carte une raclette ou une fondue mais pizzas, pates et risotto feront très bien l’affaire 😉 J’adore comme ils se sont emballés sur les noms des chalets : Meribel, Courchevel, Innsbruck… a fortiori si l’on considère que la station ne propose qu’1km de piste !! L’après-midi, les garçons partent faire une session de paintball (uniquement le tir sur cible), Louise préfère lire quant à moi je m’amuse à faire quelques recherches sur les stations de ski en Afrique. Pas facile de s’y retrouver car certaines sont à l’abandon, mais il semble qu’il y en ait 9 : 2 en Afrique du sud, 1 au lesotho, 3 au Maroc et 2 en Algérie et 1 indoor en Egypte. Voilà voilà !
Comme on ne souhaite pas dormir dans la station, on décide de retourner au bivouac de la veille près de la station de pompage. On profite de la soirée pour faire un gros tri dans nos affaires : a priori nous ne devrions plus avoir froid dans les prochains mois et les enfants grandissant pas mal de vêtements ne sont plus à leur taille. Nous donnons tout cela au gardien qu’on a trouvé très sympa et hop, un heureux et quelques kilos de moins dans pépère ! Notre séjour s’achève tranquillement au Lesotho. Avant de quitter le pays nous faisons une dernière visite : Lephofung caves, des peintures rupestres sous un escarpement. On a un peu de mal à rentrer dans la visite : le guide nous laisse lire les rares explications sans nous éclairer davantage, les enfants montrent un désintérêt à la limite de l’impolitesse… A leur décharge on a vu énormément de peintures rupestres depuis que nous sommes en Afrique et celles-ci ne sont définitivement pas les plus belles. Et voilà, nous sommes le 14 février, c’est notre dernière journée au Lesotho, cet étonnant petit royaume indépendant enclavé dans l’Afrique du sud. Pour entrer en Afrique du sud, on doit faire un test antigénique à la frontière et en moins de 30 minutes nous sommes de retour dans cet immense pays moderne. Dès les premiers kilomètres, on retrouve… des clôtures de part et d’autre de la route. Voilà quelque chose qui ne nous avait pas manqué ! Allez, je vous laisse, je vais tenter à présent de faire un petit bilan de ces 2 semaines passées dans ce magnifique pays.