Un peu frustrés au Drakensberg
Lundi 27 septembre, nous sommes un peu déçus de ne pas entendre l'appel de la prière. Mesud, qui nous a accueilli la veille dans l'enceinte de la mosquée, nous explique qu'ils n'utilisent les haut-parleurs que pour la prière du soir afin de ne pas déranger les voisins. Il n'est pas venu les mains vide, il nous apporte un délicieux cake à la banane que les enfants engloutissent en moins d'une minute pour le petit-déjeuner. Nous reprenons la route en milieu de matinée mais n'allons pas bien loin puisque nous décidons de déjeuner au bord du Albert Dam, dont l'entrée est incluse dans notre pass (vraiment pratique ce truc !). Nous y croisons quelques autruches, gazelles et des zèbres bloquent carrément l'entrée des sanitaires au grand plaisir de Martin qui s'essaie à la photographie.
Puis nous nous arrêtons à Howig, lieu de capture de Nelson Mandela le 5 aout 1962. Il a ensuite passé les 27 années suivantes en captivité. Le musée est petit, on y trouve la voiture dans laquelle il a été interpellé, ainsi qu'un long comptoir avec photos et documents expliquant tou son parcours, en parallèle évidemment avec l'histoire du pays. Dehors, à l'endroit exact de l'interception, il y a une étonnante sculpture façon trompe l'œil : de loin on ne voit que des espèces de poteaux. De près et bien en face, c'est bien le visage de Madiba que l'on reconnait. Même si ce n'est certainement pas le musée le plus riche, c'est surtout pour nous l'occasion de rendre concrète l'époque de l'apartheid dont nous avons déjà parlé longuement avec les enfants. Juste une anecdote sur ce musée : on n'a absolument rien compris à leur système de tarification : l'entrée est à 100R/adulte, gratuit pour les moins de 12 ans. Donc normalement, en trichant un peu sur l'âge d'Eliott, on devrait payer 200R. Mais sur internet nous avons repéré un pass famille à 180R, que nous demandons à l'accueil. La réponse nous laisse perplexe : on ne peut pas acheter ce pass car il est réservé aux familles avec des enfants "payants". La jeune femme à l'accueil sent bien que le truc n'a pas vraiment de sens. Avec un grand sourire, je change donc l'âge de nos enfants qui ont désormais 12, 13 et 14 ans! Avec un grand sourire en retour, elle me tend un ticket à… 160R… j'ai pas cherché à comprendre cette fois !! La nuit est en train de tomber lorsque nous prenons une petite piste qui nous conduit sur un petit escarpement avec une vue fabuleuse sur la vallée en contrebas. Quand je pense que plein de gens nous ont dit que nous ne pourrions plus faire de bivouacs sauvages en Afrique du sud ! Pour l'instant nous n'avons pas de difficulté et nous nous sentons parfaitement en sécurité !
Le lendemain, le ciel est blanc/gris, c'est dommage nous avons une très mauvaise visibilité alors que nous arrivons dans le massif du Drakensberg, réputé pour être l'un des plus beaux paysages du pays. Et pas de bol, la pluie est annoncée pour toute la semaine. C'est bien notre veine ! Alors que nous prenons de l'altitude, les petits villages se succèdent, la région est assez peuplée ! Nous entrons dans le parc de "Giant Castle", et choisissons un peu au hasard une randonnée de 5km pour nous remettre en jambes, ça fait longtemps qu'on n'a pas marché ! Nous sommes très vite surpris par la couleur qui nous entoure, ou plutôt devrais-je dire les couleurs : des espaces très verts et d'autres tout jaune. Nous comprenons que le parc brule régulièrement les collines, afin de régénérer les sols. Du coup, tous les versants "verts" sont les jeunes pousses qui se développent vigoureusement. Ca rend le paysage un peu bizarre quand même lorsqu'on passe devant de larges bandes vertes au milieu d'une colline jaunie. Au final, la randonnée se fait bien, même si à un moment les enfants montent un piquet de grève en mode "on a faim et on en a marre que vous disiez "encore un peu plus loin"!". Mais nous sommes un poil déçu car elle ne permet pas d'avoir de jolies vues sur les montagnes en face. On a regardé un peu trop rapidement le plan avant de nous décider ! Nous accélérons sur la fin pour éviter les gouttes, puis nous passons un moment en ville pour faire des courses, faire le plein de gasoil, le plein d'eau etc. Et l'heure tourne, l'heure tourne est nous voilà encore en pleine ville (une grande ville !) alors qu'il fait presque nuit. Les gars de la station-service nous disent qu'on peut dormir en face de chez eux sur un espèce de terrain vague mais on ne le sent pas, c'est trop "en ville" et visible. Finalement, nous atterrissons quelques kilomètres plus loin sur un immense parking de routiers. A défaut d'être glamour, c'est au moins sécurisé ! (et aussi très bruyant mais bon…).
Le lendemain, il pleut encore. Nous conduisons jusqu'à Cathedral Peak mais n'entrons pas dans le parc, ça ne sert à rien la vue est complètement bouchée et on ne marchera pas aujourd'hui. Du coup on fait demi-tour et on s'arrête déjeuner dans une excellente boulangerie, et nous allons ensuite chercher du réconfort dans un chocolate bar : craquage total sur une fondue au chocolat ! Nous roulons un moment sur une petite piste pour trouver un endroit d’où on pourrait avoir une jolie vue. Ca monte, ça descend, on traverse la rivière jusqu'à arriver dans un immense champs au bord de la falaise. Renaud va voir la maison la plus proche pour les prévenir (histoire qu'ils ne s'inquiètent pas et n'appellent pas la police !), et il revient avec une poignée de gamins entre 12 et 15 ans qui passent une petite heure chez nous ;) On échange sur l'école, ils visitent notre maison, jouent avec nos frontales… et c'est moi qui dois les mettre dehors alors qu'il fait nuit noire !
Le lendemain, la vue est complètement bouchée… génial ! En plus il a beaucoup plu toute la nuit et la piste est devenue boueuse. Certains passages bien raides sont un peu stressants : Renaud reste en 1ère et frein moteur pour éviter de déraper sur la fine couche de boue collante. Pour être honnête, nous passons une journée un peu pourrie : on ne sait pas vraiment où aller, on change d'avis toutes les 5 minutes et du coup on se retrouve à pas mal rouler sans rien faire pour autant. Finalement, nous faisons une croix sur ce qui est censée être la plus jolie randonnée du coin, Sentinel Peak. L'accès est payant (15€ pour nous), le parking au sommet sera probablement payant ainsi que la navette pour faire les 10 derniers km impraticables en camping-car. Par beau temps ok mais là sans être surs de pouvoir faire la rando on trouve que ça ne vaut pas le coup. Nous redescendons donc vers le parc du Royal Natal, dormant sur un point de vue magnifique.
Et quelle surprise de voir enfin le soleil en ouvrant les rideaux le lendemain matin ! Argh finalement on aurait pu faire la rando ! Mais nous sommes à plus de 100km à présent, c'est trop tard et ce n'est donc pas la peine de se lamenter ! Allons plutôt profiter de cette belle journée pour faire une rando dans le parc Royal natal. Et quelle jolie rando !! Nous découvrons l'amphithéâtre, une paroi rocheuse en forme d'arc de cercle qui semble envelopper la vallée, nous marchons jusqu'aux petites chutes du Tigre sur un sentier nous offrant des vues sublimes, et nous revenons en longeant la rivière. De petites cascades nous offrent un joli point de pique-nique, et alors que les garçons sont en train de barboter dans l'eau glacée, ce qui ressemble à une procession investit les lieux. Des femmes s'immergent sous les flots de la cascade, au son d'un tambour et du chant des participants. Je m'approche pour demander ce qui se passe : est-ce un baptême ? Une jeune femme me répond avec plaisir, ravie que je m'intéresse à sa culture : il s'agit d'une cérémonie orchestrée par une chamane, afin de se purifier le corps et l'esprit. Dans le groupe, il y a 2 apprentis chamanes en formation, et 1 jeune femme supposée avoir des dons de clairvoyance et dont le pouvoir va être testé. Et tout ça étroitement lié avec le christianisme puisque les "meneurs" portent des capes ornées de croix et que la cérémonie est réservée aux croyants. Toujours étonnant ce syncrétisme je trouve, ces codes empruntés à deux cultures différentes ! Nous avons donc passé une super journée.
Dans l'après-midi, nous prenons une petite route que Renaud a repérée de loin, juste à la sortie du parc. C'est parfait, elle nous conduit en face du massif montagneux avec une vue magnifique. Nous allons nous présenter aux 2 maisons de part et d'autre du champ, il n'y a que des femmes et des enfants. L'une d'elle vient prendre un selfie avec nous devant la maison, en tout cas nous sommes accueillis avec de grands sourires. Puis 4 personnes arrivent d'une maison en contrebas. Ils ne parlent pas anglais mais je comprends qu'ils me parlent du vaccin contre le Covid. D'abord je pense qu'ils me demande si je suis vaccinée, puis je comprends ! En voyant notre véhicule, semblable à un fourgon blanc médical, ils nous ont pris pour une clinique mobile passant de villages en villages pour vacciner ! Nous avons déjà été pris pour des vendeurs de glace, parfois pour un food truck, souvent pour un minibus local, mais pour une clinique, c'est bien la première fois !
Comme prévu, nous passons une nuit très tranquille. Mais nous sommes un peu déçus au réveil ce matin (dimanche 3 octobre) : à nouveau des nuages qui bouchent la vue et un petit crachin. Décidemment nous n'avons pas eu de chance avec la météo dans notre découverte de cette région. Nous restons un peu sur notre faim, n'ayant pu vraiment apprécier qu'une petite partie des fabuleux paysages du Drakensberg. Cette frustration a joué sur nos nerfs aussi : plus irritables, plus facilement énervés, on s'est pas mal chamaillés cette semaine, les enfants entre eux, les parents entre eux et les enfants contre les parents aussi… la totale ! Aujourd'hui, nous passons à autre chose en nous promettant d'essayer de revenir dans le coin. Mais il est temps pour nous de quitter les montagnes. Ce midi nous sommes invités chez Keith et Heidi à Ladysmith, à une centaine de kilomètres d'ici. L'histoire derrière cette invitation est incroyable : nous avons croisé Keith et Heidi brièvement en mai au Fish River Canyon, en Namibie; après avoir échangé quelques mots, ils nous avaient laissé leur coordonnées en nous faisant promettre de les contacter quand nous serions dans la région (ce que nous avions prévu de faire car vous nous connaissez, nous refusons rarement une invitation !). Quelle ne fut pas notre surprise, en début de semaine, d'être arrêtés par un gros 4x4 blanc et de reconnaitre Keith au volant, son épouse à ses côtés ! Si ce n'est pas le destin, ça !! Et voilà, nous sommes en train de rouler vers chez eux à l'heure où je termine cet article. On devrait arriver juste à temps pour le braii (=bbq) dominical ;)