« Je vous laisse 10 minutes pour dégager d’ici ! »
Ouh la la, ça faisait longtemps qu’on ne s’était pas pris la tête comme ça avec des gens ! Ce n’est pas forcément ce qu’on a envie de retenir de ces derniers jours mais c’est incontestablement une émotion forte qui nous a un peu ébranlés ! Mais laissez-moi revenir un peu en arrière pour vous raconter tout ça. Jeudi 27 mai, le lendemain de notre vol incroyable au-dessus du delta de l’Okavango et alors que nous nous apprêtons à quitter la petite ville de Maun, je reçois un message de Mathieu et Séverine avec lesquels nous avions passé quelques jours en Namibie : « vous êtes où ? Nous arrivons dans la journée à Maun ». Il nous faut à peine quelques secondes pour changer nos plans et les enfants sautent littéralement de joie à l’idée de revoir leurs copains Louis et Paul. Nous passons la journée et la soirée en leur compagnie toujours dans le même camping où les enfants ont maintenant leurs habitudes entre notre emplacement et la petite aire de jeu. Comme nous sommes les seuls clients, ils en profitent même pour allumer des barbecues à plusieurs emplacements, juste pour le plaisir 😉. Tandis que nos amis restent encore quelques jours ici, notamment pour faire la balade en mokoro sur l’Okavango, nous décidons de prendre la piste qui monte au nord de Maun sur une centaine de kilomètres jusqu’à la rivière Kwaï. Nous n’avons pas beaucoup d’information sur l’état de la piste, l’office de tourisme nous affirme qu’il faut un 4x4, mais nos amis les Bos Trotteurs l’ont prise en camping-car il y a 5 ans et y ont fait un bivouac incroyable au milieu des animaux… espérons que la piste n’ait pas trop changé ! Cette région a la particularité d’être « coincée » entre les parcs nationaux de Moremi et Chobe (accessibles exclusivement en 4x4) et donc particulièrement riche en faune sauvage dans la mesure où les parcs ne sont pas clôturés. Vendredi, nous décidons de tenter notre chance, au pire on fera demi-tour si ça devient trop compliqué ! La piste s’avère être relativement large, mais assez pénible car c’est de la grosse tôle ondulée qui nous oblige à rouler très lentement. Pépère passe sans broncher les quelques passages avec du sable plus profond, et il nous faut 4h pour rejoindre le point indiqué par nos amis voyageurs près de la rivière Kwai. Sur le chemin, nous avons été gatés : des zèbres, des impalas, un couple de buffles, des cobes et quelques éléphants ! Mais nous arrivons devant un grand panneau indiquant que l’endroit est une « community area » et qu’il faut reporter au campsite le plus proche, sous-entendu, pas de bivouac sauvage ou alors en payant une somme substantielle à ladite communauté.
Zut alors ! Nous repérons un point d’eau une dizaine de kilomètres proche de la piste et décidons de tenter notre chance. Pas de panneau ici, des voyageurs y sont passés récemment d’après notre appli et le coin est juste parfait, à quelques mètres d’une famille d’hippos. Ça devrait le faire ! Vu la proximité du point d’eau, nous ne faisons pas les téméraires et restons à l’intérieur du camping-car. C’est dingue de les entendre respirer et grogner si proches de nous, on a parfois l’impression qu’ils se parlent entre eux ! Une fois la nuit tombée, nous les entendons autour de nous mais sans parvenir à les distinguer, ça fait une drôle d’impression !
Le lendemain en fin de matinée, des éléphants viennent s’abreuver au point d’eau, c’est magique ! Nous sommes en pleine session d’école quand un 4x4 se gare à nos côtés. Renaud y va mais m‘appelle rapidement en renfort : ils nous demandent de payer 300 pulas/personne (=23€/pers) au motif que nous sommes sur une « community area » (mais pas la même que celle d’hier visiblement). Malgré nos excuses et notre promesse de lever le camp ils montent rapidement sur leurs grands chevaux lorsqu’ils comprennent qu’on ne souhaite pas payer : photo de la plaque d’immatriculation, menace d’appeler la police, ton qui monte… pas cool. Ils nous passent leur boss au téléphone, une dame à laquelle je renouvelle nos excuses et explique notre situation (pas de panneau, pas de connaissance qu’il était interdit de camper, plusieurs exemples de voyageurs qui ont dormi là, plusieurs voitures sont passées hier sans rien nous dire, y compris des militaires etc). Elle nous informe que seul son boss à elle peut nous autoriser à ne pas payer et que justement il doit venir dans le coin, on pourrait en discuter de vive voix. Ça nous va parfaitement, ils nous font promettre de ne pas partir en attendant, ou disons plutôt qu’ils nous font tout un tas de menaces de représailles si l’on décidait de nous enfuir 😉 3 heures plus tard, le 4x4 du boss arrive, il n’a pas l’air commode et effectivement il ne l’est pas. Nous avons droit à des « c’est illégal ce que vous faites », « vous êtes sur un terrain privé », « c’est un terrain de chasse », « on va vous faire déguerpir »… bref, nos explications et excuses n’ont aucun effet et nous nous faisons enguirlander comme des gosses. Lorsque arguant de notre bonne foi, je renouvelle mon souhait d’être exemptée de payer les 100€ demandés, il nous lâche, glacial cette petite phrase : « je vous laisse 10 minutes pour dégager d’ici ». Soit, on ne fanfaronne pas et on plie bagage aussitôt. Mais il est déjà 16h et on va devoir se trouver un autre bivouac en pleine nature car on n’aura pas le temps de revenir sur Maun. On tourne un petit moment, on essaie quelques pistes étroites qui ne nous conviennent pas, puis on finit par trouver un espace dégagé en plein bush où on ne devrait pas être repérés. Nous mettons un moment à nous remettre de notre émotion, c’est je crois l’une des premières fois de nos voyages que nous nous faisons virer comme des malpropres et la sensation n’est vraiment pas agréable !
Le lendemain, un peu échaudés par cette expérience, nous ne trainons pas pour revenir sur Maun. D’autant que nous allons y retrouver Mathieu et Séverine ainsi qu’une autre famille de voyageurs avec lesquels nous sommes en contact depuis plusieurs mois : Noémie, Julien et leurs 3 enfants qui voyagent comme nous en camping-car. Comme souvent, le contact passe super bien, aussi bien entre les parents qu’entre les enfants. Discussions et beaucoup de jeux rythment les 2 journées que nous passons tous ensemble. Sans oublier les apéros évidemment 😉 A noter que nous nous faisons gentiment mais fermement virer du bivouac sur lequel nous passons la 1ère nuit ensemble, les gens insistant vraiment pour que nous allions au camping le plus proche. 3 véhicules garés ensemble, évidemment nous ne passons pas inaperçus ! Du coup pour la 2ème nuit nous nous enfonçons un peu plus dans le bush jusqu’à un grand champ plat avec de l’ombre, idéal pour nous. Avec Renaud nous passons une tête à la maison la plus proche pour demander l’autorisation de rester mais nous ne trouvons personne. En fin de journée, une personne passera et nous indiquera que nous sommes sur un terrain privé, mais par son intermédiaire nous avons l’accord du propriétaire pour rester la nuit. Ouf ! Ce matin, c’est à nouveau la tristesse des au-revoirs chez les enfants… pas si facile ces liens qui se tissent pour de courtes durées ! Il est temps pour nous de quitter la région de l’Okavango, nous piquons vers l’est pour partir à la découverte du reste du pays.