Un final tout en couleurs
La petite ville de Vardo est notre prochaine étape. Nous flirtons avec la frontière russe ! Il y a plusieurs points d’intérêt ici : le premier est assez étonnant : un magnifique mémorial inauguré en 2011 pour commémorer les condamnations à mort de 91 personnes de la région (77 femmes et 14 hommes) entre 1621 et 1692 au motif qu’elles pratiquaient la sorcellerie. En plus d’être esthétiquement très beau, le mémorial nous plonge vraiment dans l’ambiance avec sa chaise en feu, les 91 ampoules allumées dans le corridor et surtout le compte-rendu précis de chacun des jugements. On y découvre le mystérieux jugement par l’eau auquel seront soumis bon nombre des accusés : jetés dans l’eau pieds et poings liés, ceux qui coulent sont innocents, ceux qui flottent sont coupables car Dieu présent dans l’eau repousserait le Malin. Ça doit fonctionner puisqu’aucun des accusés n’a coulé, confortant ainsi les délations des voisins. Les enfants, avec leur goût pour le morbide, ont adoré !
Nous enchainons ensuite par une balade sur la presqu’ile jusqu’à un petit phare. Le soleil joue à cache-cache, de même que les enfants qui s’en donnent à cœur joie dans les vestiges de bunkers et tunnels de l’armée allemande. Partout en Norvège, on trouve des traces de l’occupation allemande. Le pays a en effet été occupé pendant les 5 années de la guerre, les allemands s’en servant comme base pour surveiller l’atlantique nord tout en sécurisant leur approvisionnement en fer en provenance de la Suède.
Et pour finir cette promenade, nous faisons un stop au « Drakkar », une étrange œuvre d’art en plein air, mi bateau viking mi squelette de baleine. Mais le soleil nous ayant quitté, nous ne nous attardons pas et remontons en vitesse nous réchauffer dans le camping-car.
Nous empruntons ensuite une très belle route à une voie qui, au bout de 88km, s’achève en impasse ! Le relief est étonnamment différent de ce que nous avons vu jusqu’à présent, avec des strates de roche noire déchiquetées se jetant dans la mer de Barents. Le village de Hamningberg, tout au bout, ne compte que quelques maisons. Nous restons 2 jours avec la sensation d’être au bout du monde. Une pluie fine tombe régulièrement, et nous ne faisons pas de balade cette fois-ci. Entre 2 averses, nous admirons 2 baleines au large. Après moultes recherches et discussions, nous pensons qu’il s’agit de globicéphales (pilote whales en anglais). Sur cette plage isolée, nous rencontrons une famille d’allemands en voyage depuis 2 ans et demi. C’est très rare de croiser des familles allemandes sur la route, car dans leur pays l’école (et non l’instruction, comme en France), est obligatoire et ils risquent de grosses amendes voire poursuites judiciaires s’ils retirent leurs enfants de l’école ! Nous passons le début de la soirée avec eux autour d’un bon feu et de Chamallow grillés, miam miam 😉 Un peu plus tard, alors que le ciel s’est dégagé, je regarde le ciel par la fenêtre et j’aperçois des lueurs vertes. Des aurores boréales ! Malgré le froid et l’humidité, nous sortons et nous nous retrouvons sous un spectacle hallucinant ! Des rideaux de lumière dansant au-dessus de nos têtes ! Louise, qui s’endort toujours très tard, nous rejoint (en petite culotte !), et nous réveillons les garçons pour qu’ils assistent au spectacle. Enfin… nous essayons ! Impossible de réveiller Martin malgré plusieurs tentatives, quant à Eliott il sort 3 minutes, la tête dans le ***, et préfère retourner se coucher. Nous restons donc avec notre poulette pendant une bonne vingtaine de minutes, à admirer cet incroyable spectacle que nous offre la nature. Moi qui prends la plupart de nos photos avec mon mobile ou en mode « auto » les rares fois où j’utilise notre boitier Reflexe, j’essaie de régler l’appareil photo en suivant scrupuleusement les conseils de voyageurs grands amateurs d’aurores boréales. Sans trépied (le nôtre est en Tanzanie !), c’est mission impossible, mais on arrive à prendre deux ou trois photos qui, à défaut d’être réussies, donnent quand même un petit aperçu de ce que nous avons vu.
Lundi (14 septembre), nous quittons Hamningberg par la même route qu’à notre arrivée, et toujours sous la pluie. Nous avions prévu de faire quelques arrêts sur le chemin, mais la pluie nous en dissuade, et nous finissons par faire une grosse journée de route ! Ce sont nos tous derniers jours en Norvège et comme souvent quand on change bientôt de pays, j’ai cette bizarre envie d’en finir rapidement, de passer à l’autre pays sur lequel je commence à me pencher, à projeter un itinéraire… Comme si je n’avais plus envie de m’investir dans le pays dans lequel je suis. Bon visiblement je suis la seule de la famille à ressentir cela, et aujourd’hui (mardi), Renaud nous arrête au Parlement Sami de Karasjok pour le visiter. Malheureusement, en raison du COVID aucune visite n’est organisée. Nous ne pouvons qu’admirer de l’extérieur cet édifice mis en place pour représenter et traiter des affaires concernant les Samis en Norvège (l’Etat ayant décidé de mettre la culture et la langue norvégienne Et la culture et la langue samie sur un pied d’égalité). A défaut de visite culturelle, nous en prenons plein les yeux sur la route grâce aux couleurs automnales des arbres et des arbustes qui bordent la route, surtout quand un rayon de soleil vient les illuminer ! Ils appellent cela la Ruska, l’été indien en Laponie. Ce soir, nous dormons près de Kautokeino, qui sera notre dernière étape en Norvège. Dernière étape avant quoi ? Figurez-vous qu’on s’est encore posé beaucoup de questions aujourd’hui mais notre choix est fait : demain, nous entrons en Suède ! Enfin, on l’espère parce que techniquement nous allons d’abord entrer en Finlande, faire quelques kilomètres et ensuite entrer en Suède. Sauf que la Finlande n’autorise plus les voyageurs en provenance de Norvège depuis une quinzaine de jours… et que s’ils nous refusent ce transit, c’est un long détour qu’on devra faire pour rejoindre le poste frontière suivant ! Affaire à suivre, donc…