Grimpette dans le Tigré (et vol des chaussures…)
A peine revenus du Danakil, nous prenons la route en direction des montagnes du Gheralta. Un paysage tout droit sorti de l’ouest américain, avec des formations rocheuses ocres et rouges qui émergent d’une vaste plaine. C’est très beau ! Comme souvent depuis que nous sommes en Ethiopie, nous avons du mal à juger les distances et durées de trajet, et il fait quasiment nuit lorsque nous arrivons. L’hôtel dans lequel nous pensions nous arrêter nous trouve trop imposant pour son petit parking, et nous voilà à chercher un bivouac alors que la nuit tombe. Nous n’allons pas bien loin et trouvons un emplacement au bord de la piste menant à l’hôtel, cachés de la route. Et cerise sur le gâteau, aucun gamin ne vient à notre rencontre pour nous quémander quoi que ce soit !
Nous sommes dans la région du Tigré qui recèle un vrai trésor : 120 églises creusées dans la roche. Mais au lieu de les creuser en-dessous du niveau du sol, comme à Lalibela, cette fois-ci les pèlerins sont allés tailler la roche en hauteur, au sommet de pitons rocheux parfois vertigineux ! Nous ne verrons évidemment pas toutes les églises ! Pas facile d’ailleurs de choisir. Nous portons dans un premier temps notre choix sur 2 églises : Maryam Korkor et Daniel Korkor. Au départ du sentier, nous prenons les services d’un « scout » chargé de nous montrer le chemin et nous aider dans les endroits difficiles. Comme on ne sait pas trop à quoi s’attendre, on préfère assurer le coup ! Nous commençons à grimper une pente bien raide faite de gros rochers, sans grosse difficulté mais qui coupe un peu les jambes. Puis nous attaquons une partie encore plus raide, à flanc de falaise. Il faut s’aider des mains et des pieds et ne pas regarder en bas car nous sommes à plus de 150m du sol maintenant. Les enfants s’éclatent, ils sont bien plus agiles que moi ! Une fois arrivés sur le plateau au sommet, nous savourons le paysage magnifique sous nos yeux, puis nous nous dirigeons vers la petite église de Maryam Korkor. Le prêtre nous ouvre la porte et nous pénétrons dans une église/grotte avec quelques peintures bien abimées, des piliers cruciformes et une agréable odeur d’encens qui nous chatouille le nez.
Puis nous allons vers Daniel Korkor, qui est juste derrière le rocher. Mais le sentier pour y aller est très étroit et de ce côté, la falaise est à pic ! Impressionnant ! Renaud et Marion ont un peu le vertige, les enfants pas du tout mais sont très prudents et (pour une fois !) respectent bien les consignes. L’église est minuscule, tout comme la porte pour y entrer. Mais quelle idée de vouloir aller prier ici !! Nous profitons de la vue incroyable pour manger un morceau, assis les pieds à quelques mètres du vide. Le chemin du retour n’est pas simple car la pente est toujours aussi raide. Le scout nous aide bien, indiquant aux enfants où poser leurs pieds et rattrapant Louise par le bras lorsque son pied dérape. Notre petite balade nous aura pris presque 5 heures ! Du coup, nous n’envisageons pas de visiter une autre église, préférant aller faire un tour au marché. Nous sommes tout heureux d’y trouver de la salade et des blettes. Des légumes verts !! ça fait plusieurs semaines que nous n’en avons plus dans nos assiettes… Le soir, nous retournons dormir au bivouac calme de la veille, qui s’avère toujours aussi calme.
Le lendemain, nous nous préparons pour aller à Abuna Yenmata. Nous avons demandé à des guides si c’était jouable avec des enfants, ils nous ont dit qu’il y avait des passages difficiles mais que ça pourrait aller. OK, on tente ! Au départ du sentier (payant), on nous propose une corde pour un passage de quelques mètres à la verticale. Problème : ils louent la corde à la personne, et non pas au groupe. Sur le principe, nous refusons de payer 14€ de location d’une corde, le même prix que l’entrée de l’église. Nous partons sans la corde, nous verrons bien ! (et nous savons qu’en Ethiopie, il y a toujours moyen de trouver une solution si on a besoin de cette corde finalement…). Le sentier est moins agréable que la veille, ce sont des marches inégales. Jusqu’à ce qu’on arrive au passage qui se complique, à nouveau à flanc de falaise, mais encore plus étroit que la veille ! Cette fois-ci je ne le sens pas. Pas pour moi, mais pour les enfants ! Marion et moi rebroussons chemin avec les enfants tandis que Renaud continue pour voir si ça pourrait passer. Car évidemment, Eliott et Louise veulent absolument poursuivre ! Quelques mètres après que nous l’ayons quitté, Renaud arrive au passage nécessitant la corde : une paroi verticale de 3 ou 4 mètres de haut qu’il parvient à grimper sans corde en suivant les consignes d’un scout. Mais c’est surtout après que ça aurait été trop dangereux pour les enfants : il faut longer la falaise sur une dizaine de mètres pour parvenir à l’entrée de l’église. Mais ces 10 mètres ne mesurent pas plus d’1 mètres de largeur ; ensuite, c’est un vide vertical de 200 mètres de haut ! Rien qu’à regarder les photos et vidéos de Renaud, j’en ai des frissons. Mais lui s’en sort très bien visiblement, nous le voyons revenir 30 minutes plus tard avec un grand sourire. De notre côté, ça nous aura fait une belle balade avec encore un panorama à couper le souffle !
Nous prenons ensuite la route pour Aksoum. Nous pensions arriver le soir même, mais c’était sans compter la chaine de montagne nous faisant faire de nombreux lacets et les nombreux poids lourds difficiles à doubler entre les virages. Nous ferons donc un nouveau bivouac sauvage, en surplomb d’une falaise… pas mal ! 2 gamins se précipitent vers nous pendant que nous nous garons. Nous leur achetons de la canne à sucre pour qu’ils nous lâchent, mais ils restent près de nous, surtout un qui est planté devant notre porte à nous demander des vêtements. Ils finissent par partir, et sont remplacés par un autre gamin plus jeune (7 ans ?) qui répète inlassablement « guimi », que nous pensons être « give me »… Lorsque Renaud sort pour se dégourdir les jambes, il s’aperçoit que le gamin « aux vêtements » nous a piqué 2 paires de chaussures de bain rangées dans la porte. Sans hésiter, il saisit le bras du petit qui est encore là, lui demandant d’une grosse voix de le conduire chez le petit voleur. Ils partent tous les deux dans la nuit noire. Je vous passe les détails, mais en gros le gamin en question habitant loin apparemment, Renaud commence à faire du stop (en tenant toujours la main du petit !). La première voiture qui s’arrête est une camionnette avec 4 ou 5 hommes armés à l’arrière. Par chance, il s’agit de policiers, qui se saisissent aussitôt de l’affaire. Renaud et le gosse restent à l’intersection à les attendre pendant 2 bonnes heures, à se geler les miches sans personne qui parle anglais autour de lui (et personne qui lui offre le moindre thé… on n’est plus en pays arabe !! 😉). Un grand moment ! Il finit par récupérer les 2 paires et rentre à temps pour se régaler d’une bonne poêlée de pommes de terre accompagnée d’une salade avec une sauce à l’ail… miam !
Aujourd’hui (vendredi 6 décembre), nous sommes finalement arrivés à Aksoum. Nous y visitons des églises (encore !!) et des tombeaux surmontés de grands obélisques. La ville est assez agréable, mais les enfants nous piquent une petite crise : trop de marche ces 2 derniers jours, ils se mettent en grève et veulent rentrer au camping-car. Il faut dire qu’on enchaine pas mal des visites ces derniers temps, alors un temps de lecture/dessin/jeux « à la maison » est parfois le bienvenu !